Jeu de Go : CALCUL DU SCORE EN FIN DE PARTIE
Texte proposé par J. Hossenlopp
A) Décompte en règle française, appliqué à une partie à égalité sur 19x19
Diagramme 1 : …après le coup 227 de la partie
Après le coup 227 du diagramme 1 (page suivante), la partie[1] est presque finie. Avec le nouveau komi à 7½, Noir va la gagner de 7,5 points. Je me propose d’illustrer le décompte de cette partie avec trois méthodes différentes. Évidemment, « par construction », le résultat de ces trois méthodes est identique.
- Le premier décompte, dit « normal », est la méthode de base de la règle française. Cette méthode consiste à additionner la valeur de ses territoires ET le total de ses pierres vivantes. Elle est rarement utilisée car elle est réputée longue et compliquée. En réalité, elle est surtout mal connue. Bien sûr, elle a ses inconvénients, mais elle a aussi beaucoup d’avantages, notamment parce qu’elle n’utilise ni les prisonniers faits en cours de partie, ni les « pierres de passe » (utilisées dans de la 2e méthode de décompte), ni les pierres mortes retirées du goban après la fin de la partie. Cette méthode est très proche de la méthode chinoise[2].
- Le deuxième décompte, dit « rapide », est celui qui
est habituellement utilisé en France. Il s’inspire directement de la méthode
japonaise dont la règle était utilisée en France avant l’adoption d’une règle
spécifique inspirée de la règle AGA (règle des États-Unis). Le seul problème
de cette méthode est d’ordre psychologique : en effet, pour assurer une
stricte équivalence avec le décompte dit « normal », la règle AGA
et la règle française ont introduit la cession d’une « pierre de passe »
à ajouter aux prisonniers. En outre, pour que chaque joueur ait joué
exactement le même nombre de coups durant la partie, Blanc doit passer en
dernier (ou bien, ce qui est équivalent, il doit donner à Noir une pierre
supplémentaire si c’est Noir qui a annoncé le 2e « passe »
consécutif marquant la fin de la partie).
- Le troisième décompte utilise l’idée de la « règle Ing » ;
cette règle implique que chacun des deux joueurs dispose exactement de 180
pierres de sa couleur, ce qui est automatique avec les « boîtes Ing ».
Ce décompte est le plus facile des trois. Cependant, si on ne dispose pas de
ces fameuses boîtes, cette méthode oblige à compter les 180 pierres de chaque
couleur avant le début de la partie.
Dans les parties à égalité,
avec un komi à 7½,
on peut se libérer de tout calcul en plaçant quatre pierres blanches dans un
coin du territoire de Noir pour compenser ce komi. En fin de partie, après
avoir enlevé les pierres mortes du goban et placé ces quatre pierres blanches,
il suffit de remplir ses territoires par les pierres restantes de sa boîte. Un
seul des deux joueurs peut placer la totalité de ses pierres dans ses espaces tout
en y conservant au moins une intersection vide : c’est, bien sûr, ce
joueur qui gagne la partie. Cette méthode dispense de tout calcul : on
peut l’appeler « décompte visuel ».
Et si chacun des deux joueurs remplit ses territoires avec le solde de ses
pierres, il est facile, dans les parties très serrées, de contrôler que le
total initial des pierres noires et blanches était bien de
360 pierres.
Pour les puristes, en cas de
séki avec un nombre impair de points neutres (donc impossible à partager en un
« nombre entier de pierres »), Il peut arriver qu’en fin de décompte
le goban contienne l’ensemble des 360 pierres noires et blanches en plus du
point neutre non partagé. Il suffit de retenir que « en cas d’égalité c’est
Noir qui gagne ». Ceci résulte du fait qu’on a placé les quatre
pierres blanches dans un coin du territoire noir pour compenser le komi. Ces
quatre pierres représentent en fait 2 x 4 = 8 points de komi
(+4 points pour Blanc et -4 points pour Noir) ; et cette approximation
d’un demi-point n’intervient en fait que dans ces cas de séki très
particulier.
Après le coup 227 du diagramme 1, il n’y a plus d’enjeu dans la partie. Chacun des joueurs gagne l’un des deux kô simples, puis joue les damé, sans oublier les réponses obligatoires.
Diagramme 2 : une séquence
plausible de fin de partie
Le diagramme 2 montre
l’une des séquences possibles pour ces damé. Après le
coup 258 de cette séquence, chacun passe son tour et la partie est finie. On
retire alors les pierres mortes et on compte les points : total des
territoires PLUS total des pierres
vivantes.
En pratique, on se contente de compter une seule couleur et on compare le total obtenu à la moitié des points à distribuer, c’est-à-dire à la moitié de 368,5 (361 + 7,5), soit 184,25 points. Avec ce décompte, il est inutile de conserver les prisonniers faits en cours de partie. Ainsi Blanc a pris une pierre noire avec son coup 242 et il a remis cette pierre dans le bol de Noir.
Diagramme 3 : position des pierres en fin de
partie
Après les deux passes consécutifs (coup 259 de Noir et coup 260 de Blanc, et sans s’occuper des pierres de passe, les prisonniers ne servant à rien dans ce décompte), la partie est finie et les joueurs retirent du goban les pierres mortes : 4 pierres blanches et une pierre noire (pierres « X » du diagramme 3).
Diagramme
4 : territoires noirs réarrangés
Pour faciliter le décompte
des points de Noir, on déplace, par exemple, les 14 pierres « Y »
du diagramme 3 pour les replacer comme sur le diagramme 4. Sur ce diagramme on a
également ajouté 4 pierres « Z » prises dans le bol de Noir. Cela
ne change rien au résultat, puisqu’on ne s’intéresse qu’au total
« territoires » PLUS « pierres vivantes ».
Ainsi, sur ce diagramme 4, Noir n’a plus que deux territoires : l’un de 52 points (4 x 13), l’autre de 10 points. Il suffit alors d’ajouter à ces 62 points le nombre de pierres noires maintenant présentes sur le goban : le décompte de ces pierres est facilité par leur regroupement en paquets de 10, comme illustré sur le diagramme 5.
Diagramme
5 : regroupement des pierres noires 10 par 10 |
Sur ce diagramme 5, à
gauche, on a regroupé les 126 pierres noires de la figure 4 pour en
faciliter le décompte tout en évitant, si possible, de déplacer les
pierres blanches. On voit qu’on
obtient 12 groupes de 10 pierres et un groupe de 6 pierres, soit 126
pierres. Ainsi, Noir a un total de
188 points (62 + 126). Ayant plus que les 184,25 points (la moitié du
total), il a gagné la partie. Blanc
a 180,5 points
(368,5 – 188), soit 7,5 points de moins que Noir. |
C’est
la méthode habituelle pratiquée en France. Ce décompte dit « rapide »
impose de conserver les prisonniers faits en cours de partie (6 pierres noires
et 2 pierres blanches), d’y ajouter les « pierres de passe » (1
pierre noire et 1 pierre blanche) et les pierres mortes retirées du goban en
fin de partie (les pierres « X » du diagramme 6 : 1 noire et 4
blanches).
À ce stade, Blanc dispose 8 pierres noires ; Noir dispose de 7 pierres blanches.
Diagramme 6 : position des pierres en fin de
partie
Pour compter le territoire de Noir, Blanc peut déplacer les 10 pierres noires « Y » du diagramme 6 pour le replacer comme sur le diagramme 7, mais il ne doit prendre aucune pierre dans le bol de Noir ; il ajoute seulement les 8 pierres noires « P » dont il dispose, comme illustré sur le diagramme 7.
Diagramme 7 : territoires réarrangés
De même, Noir a déplacé
les 13 pierres blanche « Y » du diagramme 6 pour les replacer comme
sur le diagramme 7 (sans toucher aux frontières) et il a ajouté dans les
territoires noirs les 7 pierres « P » dont il dispose.
Noir a 48 + 10 = 58
points et Blanc en a 43 + 7,5 = 50,5 :
Noir gagne de 7.5 points.
Pour ce décompte, on suppose que, avant le début de la partie, chacun des deux joueurs dispose exactement de 180 pierres de sa couleur (la moitié du « total des intersections moins une » du goban 19x19).
Pierres résiduelles :
Diagramme 9 : placement des pierres « k » et « r »
Blanc a placé les 4 pierres
« k » dans le territoire de Noir (pour compenser le komi), après
quoi Noir remplit ses territoires avec les pierres « r » qui lui
restent : il avait 122 pierres vivantes sur le goban en fin de partie, il a
placé dans ses territoires la totalité des 58 pierres qui restaient dans son
bol. Il dispose alors d’encore 4 intersections vides. Il en conclut qu’il a gagné la partie.
Pour vérification, Blanc
peut faire de même : à ses 123 pierres vivantes sur le goban en fin de
partie, il essaie de placer dans ses territoires les 53 pierres « r »
qui lui restent (il en a déjà placé 4 dans le territoire de Noir pour
compenser le komi). En fait, il ne peut y placer que 50 pierres : il lui en
reste 3 sur les bras, ce qui confirme bien qu’il a perdu la partie.
Et la vérification est très
précise : Si Blanc plaçait ses 3 pierres restantes dans l’espace résiduel
de Noir (les 4 intersections restées vides), il ne resterait sur le goban
qu’une seule intersection inoccupée. Il y aurait donc bien 360 pierres sur le
goban.
La différence entre le
score de Noir et celui de Blanc semble être de 4 – (-3) = 7 points. Ceci résulte
de l’approximation du komi « transformé en pierres » avec ce décompte.
La procédure « visuelle » exposée ici prend en compte un komi de 8
points (au lieu des 7½).
Si on veut néanmoins obtenir un score précis, il faut alors redonner à Noir
le demi-point qu’on lui a enlevé en passant du komi de 7½ à
celui de 8.
[1]
C’est la partie entre Antoine FENECH
et Jean-François SEAILLES jouée à la 4e ronde du 3e
tour du championnat de France 2005, à Montlouis-sur-Loire.
[2] Ces deux règles sont même quasi-identiques depuis la refonte de la règle chinoise, notamment en ce qui concerne la répétition des positions.
Décompte en règle française, appliqué à une partie à égalité sur 19x19 en version Pdf
Voir également : Décompte en fin de partie d'une partie à handicap
Dernière mise à jour le 29/11/12