C’était déjà il y a 7 ans : en 2016, AlphaGo, développé par
Google DeepMind, se mesurait à Lee Sedol 9éme Dan professionnel, l’un des
meilleurs joueurs de go au monde et remportait la victoire par 4 jeux à 1, ce
qui laissait toutefois penser qu’il n’était pas totalement infaillible. Kellin
Pelrine, un joueur américain qui est 6 Dan Aga, l’a prouvé récemment, gagnant
14 des 15 parties jouées contre l’IA Katago.
Durant l’année qui a suivi la victoire d’AlphaGo sur Lee Sedol,
DeepMind a continué de l’améliorer et l‘IA remportait en
2017 la victoire par 3 à 0 face au champion mondial de la discipline à
l’époque, le prodige chinois Ke Jie.
La société profitait de cette victoire pour annoncer que cette
compétition était la dernière d’AlphaGo. Elle a cependant développé l’IA AlphaZéro,
capable d’apprendre à partir de simplement les règles en jouant des parties
contre elle-même. AlphaZéro était également capable de gagner contre le
meilleur programme d’échecs et de gagner contre les meilleurs joueurs du monde
au shogi. Il a inspiré d’autres modèles d’IA, parmi eux KataGo, conçu par David
Wu, formé en utilisant un processus de type AlphaZero amélioré, capable lui
aussi de battre des joueurs de niveau professionnel mais qui vient de se faire battre
par un amateur…
Il
faut toutefois préciser que Kellin Pelrine, outre être un
joueur de go de niveau amateur 6 Dan, est stagiaire en recherche
scientifique
au centre de recherche FAR AI, une organisation à but non
lucratif. La mission du centre de recherche californien FAR AI est de
s'assurer que les systèmes d'IA sont dignes de confiance et bénéfiques
pour la
société. Ils incubent et accélèrent des
programmes de recherche qui nécessitent trop de ressources pour les
universités, mais qui ne sont pas encore prêts à être commercialisés par
l'industrie. Leurs recherches portent en particulier sur la robustesse aux
attaques adverses.
L’une d’elles, a
démontré que même les systèmes d’IA “surhumains” peuvent abriter des modes de
défaillance surprenants et qu’il était possible de pousser KataGo, Leela Zero
ou ELF OpenGo de la société Facebook à faire de graves erreurs.
La tactique utilisée par Kellin Pelrine était simple : il a
commencé à encercler l’un des groupes de son adversaire, dessinant une grande
boucle de pierres, tout en distrayant l’IA avec des mouvements dans d’autres
coins du plateau. Un joueur humain, même amateur, aurait facilement compris ses
intentions mais selon lui, l’IA n’a pas remarqué le danger, alors même que
l’encerclement était presque terminé. Au coup 189, Katago commet la bourde finale : son groupe X n'a plus que 3 libertés et ne peut pas s'échapper. S'il avait joué simplement en A, il aurait pu s'échapper et gagner la partie |
C’est en fait un autre logiciel qui a découvert la faille de
KataGo. Celui-ci a joué plus de 1 million de parties contre KataGo, pour
trouver un angle mort dont un joueur humain a su ensuite profiter.
Il
est à noter que si le réseau seul est particulièrement faible pour
parer la faille découverte par l'adversaire de Far AI, il ne suffit pas
d'augmenter le nombre de recherches dans l'arbre des coups en le passant
même à 10.000.000 pour arriver à neutraliser la faille.
La découverte d’une faiblesse dans certaines
des machines de jeu de go les plus avancées souligne une faille fondamentale
dans les systèmes d’apprentissage en profondeur qui sous-tendent l’IA la plus
avancée d’aujourd’hui. On peut considérer que l’on a été trop hâtif d’attribuer
un niveau d’intelligence surhumaine aux machines
Références :
2)
Site
explicatif de FAR AI
4) Le Point :
Jeu de go La revanche de l’homme sur la machine